Les opinions occidentales sont-elles en train de changer leur regard sur la question du Moyen- Orient en admettant, enfin, qu’Israël porte seul la responsabilité de ce que, eux-mêmes, qualifient de point névralgique où se joue depuis 60 années la paix dans le monde et son corollaire le concept d’un droit international ? Les récentes péripéties de la flottille humanitaire, attaquée dans les eaux internationales par Tsahal, ont certes suscité quelques émotions et commentaires dénonciateurs mais est-ce suffisant pour croire que cette dernière agression serait celle de trop ?
Et qu’elle pourrait même constituer un «tournant décisif» à partir duquel «rien ne sera plus comme avant» s’agissant de la bienveillance coupable des puissances qui eurent un rôle historique dans la balkanisation de la région. La perspective d’une pareille mutation est hasardeuse en dépit de l’affichage médiatique des grandes capitales de l’Occident qui feignent, en la circonstance, se démarquer des stratégies outrancières de l’Etat hébreu. Leurs dénonciations sont de pure forme et seront vite oubliées dès que retombera la vague des manifestations de rue dans l’espace arabo-islamique. Grâce au lobbying sioniste, puissamment actif, aussi bien en France qu’aux États-Unis, Israël ne sera pas de sitôt mis au ban des nations et encore moins contraint de s’asseoir au… banc des accusés. Il est le seul Etat au monde à être considéré en «état de légitime défense permanente» quand d’autres sont, selon les besoins, pointés comme des «Etats voyous». C’est par conséquent la nature même de cette distinction discriminante qui est à l’origine d’une impunité insupportable. Une sorte de viatique qui lui fut accordé dès sa création (1948), lui permettant d’agir à sa guise et de redessiner ses frontières selon ses besoins sans jamais se référer au droit international. Or, nous avons, avec Israël, l’exemple même de l’Etat voyou sauf que celui-ci constitue l’étrange exception dérogatoire dont s’accommode sans état d’âme l’éthique dite «onusienne» à travers sa gendarmerie planétaire qu’est le Conseil de sécurité. Or, c’est précisément à la suite des pressions de ce dernier, de ses injonctions et de la brutalité de ses sanctions que les acteurs arabes de la région ont cédé à la logique du fameux «réalisme» de la voie de la paix et de la cohabitation. Rapidement, ils s’aperçurent que cette pression était non seulement à géométrie variable, selon que l’on était arabe ou israélien, mais plus encore unilatéralement destinée à eux. En un peu plus de trente ans (1977) le «regard» arabe a notoirement changé à l’égard d’Israël quand, tout au long de ces trois décennies, le caractère belliqueux et méprisant de l’Etat hébreu s’est aggravé. L’Occident, toujours sous influence des lobbies sionistes, n’a jamais voulu voir dans le changement d’attitude des Arabes une opportunité pour orienter leur pression sur cet Israël tout à fait réfractaire à l’idée de projet d’insertion dans la région. Deux tournants décisifs que le tutorat d’Israël ne sut pas capitaliser au profit d’une véritable paix équitable. C'est-à-dire deux rendez-vous majeurs qui firent deux victimes notoires : Sadate et Arafat. Au sujet de ces deux précurseurs, qui à leur époque furent qualifiés d’aventuriers, la tentation est de nos jours justifiée de mettre en parallèle le geste inouï de l’Égyptien qui, en novembre 1977, prit sur sa dignité le risque de se rendre en Israël et l’électrochoc psychologique provoqué par Arafat en 1993 en reconnaissant officiellement le vis-à-vis hébreu. Même si les deux démarches étaient à tous points de vue dissemblables tant par leur contexte que par le processus de maturation, il reste néanmoins que leurs charges émotionnelles dans l’imaginaire arabe furent identiques. De Sadate à Arafat, les masses arabes ont fini par apprivoiser l’idée que la paix était possible sans qu’il y ait de décret victorieux ni de capitulation infamante. C’est que ce «regard» arabe, manipulé par un demi-siècle de lourde propagande, n’était pas habitué, avant ces chocs psychologiques, à appréhender les situations autrement. En somme, l’on ne sort pas indemne tout à fait d’un tel handicap. Les juifs d’Israël, soumis au même rouleau compresseur de la mystique de la terre promise, en furent à leur tour troublés dans leurs certitudes. Grâce aux deux initiatives, l’idéologie sioniste était prise à revers. Dans cet Orient où le casus belli a toujours fonctionné sur des leviers émotionnels («la conscience malheureuse » cultivée par le sionisme et la «conscience de l’humiliation» intériorisée par les Arabes), deux coups de grisou vinrent balayer ces doxa fondatrices afin de faire place au réalisme et à la lucidité. Etonnamment, ils furent l’œuvre des Arabes alors que les Hébreux d’Israël et la diaspora, puissante dans les médias occidentaux, mettaient en doute cette «bonne volonté bédouine» (sic) et plus encore la rationalité du discours de l’Égyptien Sadate, et plus tard, la signature du terroriste Arafat. Grâce à la tyrannie médiatique qui censure la moindre critique, Israël cultive son vieux «complexe de Massada» pour faire croire qu’il est un Etat assiégé de toutes parts. Et les exemples ne manquent pas de ces intellectuels en France qui, après certains massacres de Tsahal, se sont surpris à défendre cette armée au nom de leur propre morale en écrivant ceci : «…mais enfin vous n’allez pas m’obliger à crier “vive Israël ?”». De même que d’autres avaient ironisé sur le discours de Sadate à la Knesset en 1977 en concluant leur commentaire par la boutade suivante : «Encore un effort, Monsieur le Président, et vous serez alors reçu cinq sur cinq.» Or, en la matière ce qu’avait dit le successeur de Nasser relevait à son époque de l’héroïsme. -«… J’ai choisi de rompre avec tous les précédents et toutes les traditions des pays en guerre en dépit du fait que l’occupation des territoires arabes se poursuit», déclara-t-il. Et d’ajouter : «Nous avions continué à refuser de vous rencontrer. Nous avons eu coutume de vous décrire comme le “soidisant” Israël». Une si lointaine et si limpide reconnaissance a-t-elle jamais suffi à cet Etat, au-dessus de toutes les lois, d’admettre l’ordre du monde, le droit des autres et de s’y conformer à son tour ? Pas du tout, car par sa nature il ne peut survivre que par le conflit et ne peut se «moraliser» que par la force de la paix. Encore faudra-t-il que l’Occident parvienne à contrôler la surenchère des lobbies en question et qu’Israël devienne un État critiquable comme le sont tous les autres. Tant que son sujet demeurera tabou et qu’il continuera à fonctionner par le chantage au nom de la culpabilité historique dans le crime nazi de l’Occident, Israël focalisera le désordre et alimentera l’expansion des ressentiments religieux que l’on sait. En un mot, il est le fourrier de l’islamisme politique et le géniteur putatif de ce Hamas de Ghaza à qui il impose un blocus inhumain. Telle est la complexité de cet Etat amoral.
B. H. le soirdAlgerie
Sujet: Israel Etat Voyou...et fourrier de l'islamisme. 
Sam 5 Juin - 13:18