MOHAND AKLI HADDADOU
Introduction à la littérature berbère
Le fait que cette langue ne soit politiquement reconnue que ces derniers temps ne l’a pas privilégiée.
Dans ce livre de trois cent pages, édité ce mois par le Haut commissariat à l’amazighité, Mohand Akli Haddadou livre la richesse de la culture berbère orale. L’auteur met à profit sa longue expérience d’universitaire dans le domaine amazigh pour livrer un ouvrage précieux et sérieux. Le livre en question est présenté en deux langues: française et berbère. Le constat est là: la littérature berbère est mal connue du public pour une multitude de raisons. Le fait que cette langue ne soit politiquement reconnue que ces derniers temps ne l’a pas privilégiée. Les anciens auteurs berbères n’ont pas écrit dans cette langue, à l’image d’Apulée, Térence, saint Augustin, Ibn Rachiq, Ibn Batouta, Amrouche, Mammeri, Feraoun, Kateb et Kheireddine. Ces auteurs ont écrit en latin, en punique, en arabe ou en français. Pourtant, l’alphabet berbère est très ancien. Il remonte au VIIe siècle avant-Jésus-Christ. Les BerbèreS ont donc possédé très tôt un système d’écriture mais la seule littérature qu’ils nous aient légué se résume à des inscriptions funéraires. C’est l’une des informations que comprend le livre de Haddadou à côté d’autres encore plus importantes sur le cheminement de la langue amazighe à travers les siècles. Dans son ouvrage, Mohand Akli Haddadou met en valeur la richesse de la littérature orale. Une littérature qui a fait l’objet d’intérêt auprès d’universitaires et de chercheurs ayant transcrit et traduit une grande partie. D’ailleurs, l’auteur cite Ibn Khaldoun qui avait écrit dans son célèbre livre L’histoire des Berbères que les Berbères racontent tellement d’histoires qu’on pourrait en remplir des livres entiers. Les genres sont diversifiés dans la littérature berbère: les contes, les légendes, les mythes, les proverbes, la poésie et les devinettes. Sans oublier les oeuvres religieuses. Haddadou nous apprend que des pièces de la littérature berbère ont même été traduites dans des langues autres que le français et l’arabe, comme les contes kabyles recueillis, transcrits et traduits en allemand par L.Frobenius: Volksmarchen der kabylen. De nombreux autres livres basés sur des histoires racontées par les Berbères ont été édités par des auteurs étrangers notamment: L’essai de contes kabyles de Leblanc et Prébois, Les fourberie de Si Djeha, de Moulièras, Les légendes et contes merveilleux de Grande Kabylie du même auteur...Au début des années quarante, furent lancés les Fichiers de documentation berbère à Larbâ Nath Irathen. Cette initiative revient à des pères Blancs. Jusqu’à 1975, des documents d’une grande variété furent régulièrement édités. L’auteur le plus prolifique dans cette collection, devenue aujourd’hui une référence en la matière, est J.M.Dallet, qui est le concepteur du premier Dictionnaire kabyle français. On peut aussi citer J.L.Degezelle. Des écrivains algériens ont contribué à ce travail, entre autres B.Zellal, auteur du Roman de Chacal. Dans son livre, Haddadou survole d’autres aspects de la littérature berbère, avec notamment l’épisode important du poète de l’errance, Si Moh Ou Mhand puis revisite les premiers romanciers berbères qui ont écrit dans d’autres langues mais dont le contenu des ouvrages est une rétrospective de la société et de la culture berbères. Haddadou parle de Mouloud Feraoun, Kateb Yacine, Mouloud Mammeri, le marocain Mohamed Kheireddine...
Dans Introduction à la littérature berbère de Mohand Akli Haddadou, le lecteur peut se délecter en lisant nombre de contes et de récits dans les deux langues: kabyle et française.
De même qu’il peut revisiter son enfance avec notamment la série de devinettes du terroir que propose l’auteur, sans oublier les proverbes traduits et expliqués. Mohand Akli Haddadou, pour rappel, est l’auteur de pas moins d’une dizaine de livres dont la majorité a trait à l’amazighité.
Aomar MOHELLEBI