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| Lounis Aït menguellet: Mon histoire avec Matoub Lounès n’était pas aussi dramatique... | |
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MissNchrea Confirmé
Nombre de messages : 2150 Date d'inscription : 31/07/2008
| Sujet: Lounis Aït menguellet: Mon histoire avec Matoub Lounès n’était pas aussi dramatique... Lun 19 Juil - 18:23 | |
| Lounis Aït menguellet. Poète, chanteur, compositeur « Mon histoire avec Matoub Lounès n’était pas aussi dramatique... » Lounis Aït Menguellet ou l’accueil des plus chaleureux : « L’interview, nous la ferons chez moi, à Ighil Bwammas, je vous y invite pour lundi. Cela vous va-t-il ? », nous dit-il tout de go. Ighil Bwammas via Larbaâ Nath Irathen, Aïn El Hammam puis Yatafen. Un trajet, fort agréable, qui fait le rappel des descriptions pointues d’un Feraoun dans Jours de Kabylie, ou de Fadhma n’Ath Mansour dans Histoire de ma vie. Des villages attachés les uns aux autres sur les cimes à redents, tels que chantés si bien par le poète Lounis : « Tamourtiw dizurar ghaf idurar. » Avant d’arriver chez lui, une poignée de jeunes villageois regroupés devant une épicerie semblent nous attendre. « Voyez-vous, nous avertit-il, mes deux couleurs préférées : le noir et le blanc. » Cette dualité qu’on retrouve dans le yin et yang, un joli tableau accroché au mur, deux faces opposées d’un monde à déchiffrer. Deux objets, cependant, captent tout particulièrement notre attention : des arcs, dont l’un est magnifiquement taillé dans un bois rare et sculpté avec un raffinement d’orfèvre. « Arc de chasse, précise-t-il. Peu de gens savent que je suis archer. » Comme dans Ulysse, il faut de la force, du savoir-faire et du doigté pour le tendre. Alors, Aït Menguellet se plaît-il à décocher des flèches empoisonnées ? Pas forcément !
Qui est Lounis Aït Menguellet dans la vie de tous les jours ? Dans la vie de tous les jours, je suis un citoyen ordinaire qui s’occupe de sa famille, de ses soucis familiaux surtout, et Dieu sait qu’il y en a ! Chacun de nous a des problèmes et je ne fais pas exception. J’essaye d’organiser ma vie, c’est-à-dire je fais tout pour que ma vie familiale soit harmonieuse, et pour cela il faut des ingrédients. Disons que je suis quelqu’un qui essaye d’utiliser son temps à bon escient, entre la vie familiale, les enfants et les loisirs qui me permettent un équilibre physique et mental. Quels rapports entretenez-vous avec les habitants de votre village, Ighil Bwammas ? D’excellents rapports ! Il ne pourrait en être autrement, parce que je suis né à Ighil Bwammas, je connais tout les villageois et tous les villageois me connaissent. J’apprécie tout le monde et je peux dire que, globalement, tous m’apprécient et c’est aussi parce que je ne suis pas venu d’ailleurs pour m’intégrer à la vie du village, bien au contraire, tous les villageois me considèrent, à juste titre, comme un des leurs. C’est ce qui explique votre attachement au village… Absolument, il faut aussi savoir une chose, c’est qu’à Ighil Bwammas, j’en arrive à oublier que je suis un personnage public, un chanteur. On me le fait oublier tellement je ne suis considéré que comme un citoyen du village. Pendant que d’autres artistes ont choisi d’émigrer, d’évoluer ailleurs, vous, vous avez préféré rester parmi les vôtres. Pourquoi ? J’ai préféré rester ici parce qu’à mon sens, je dois tout au village. Je dois tout à ma naissance dans ce village, je dois tout à ma vie parmi les miens, chose qui ne m’a jamais empêché de m’enrichir de la culture universelle par mes nombreux voyages. Cela dit, mon port d’attache, mon véritable port d’attache reste mon village et c’est ce qui fait ma force. Malgré le danger de mort qui vous guettait ? Je fais allusion aux années de terrorisme... Il n’y a absolument aucun danger qui me ferait quitter les miens. La seule chose qui pourrait le faire, c’est la déception, c’est une déception qui émanerait du village ; c’est de découvrir par exemple que je me suis trompé dans mes considérations, dans mes jugements, et là, je crois que ce serait la déception de ma vie ; et donc, dans ce cas-là seulement, je partirai sans me retourner. Enfin, j’espère que ça n’arrivera pas, et je suis sûr que ça n’arrivera jamais. Maintenant, les dangers, je ne pense pas qu’il y en ait un qui me ferait quitter mon bercail, j’ai vécu ces moments les plus durs où tout le monde voulait quitter l’Algérie. Que répondez-vous à ceux qui disent qu’Aït Menguellet doit sa survie à un compromis avec les groupes armés ? Vous conviendrez que ce sujet a été rabâché et n’attendez pas de moi de m’étaler là-dessus. Ceci dit, si c’était le cas, le dernier des terroristes capturé aurait donné mon nom. Quant à ceux qui ont propagé ce genre d’accusations, je ne daigne même pas les mépriser, car Dieu sait, je n’aime pas mépriser les gens, et je leur laisse ce réconfort si c’en est un de vouloir excuser leur incapacité d’affronter la situation en accusant de trahison ceux qui ont eu le courage de l’affronter. La voilà ma réponse. Des partis politiques ont toujours recherché vos opinions. Que leur répondez-vous, et quelle est votre position politique si vous en avez une ? Franchement, je n’ai pas de position politique, je ne suis pas partisan et je ne l’ai jamais été, parce que j’estime que si on se mettait à étudier chaque programme de chaque parti, on y trouvera du bon comme du mauvais. Certainement, vous me diriez que c’est un peu trop facile de prendre tout ce qui est bon de chaque parti politique… N’appartenant à aucun d’entre eux, j’ai cette prétention… je me sens libre d’avoir mes opinions. Alors, d’un coup, je pourrais être d’accord avec tel parti, et d’un coup, je paraîtrai d’accord avec un autre. En fait, ce n’est ni un changement d’opinion ni de l’hypocrisie politique, allant du principe que je n’ai aucun parti pris. Vous venez de signer récemment une pétition que les journaux ont reprise ; n’est-ce pas là une position politique ? Non, ce n’est pas une position politique que de défendre ceux qui se sont sacrifiés pour que nous vivions libres aujourd’hui. Je les défendrai quel que soit le prix. Je ne considère nullement cela comme une attaque envers quiconque, je considère que c’est une opinion que je me dois d’exprimer et que j’exprimerai toujours. Je suis un nationaliste dans l’âme, parce que je suis un enfant de la guerre. J’ai vécu la révolution de notre pays dans une très mauvaise condition, c’est-à-dire une position où un enfant comprend tout, se souvient de tout, mais n’a aucun moyen de se défendre, d’agir ou de faire quoi que ce soit. D’ailleurs, on oublie souvent de parler des enfants de la révolution parce qu’au moment où un adulte pouvait prendre son parti, il pouvait soit prendre les armes et aller rejoindre le maquis, soit, ma foi, si telle était sa conviction, s’allier avec le colonialiste. Par contre, un enfant n’avait même pas ce choix, il subissait tout simplement. Et c’est dans cette situation que j’ai vécu la guerre, je l’ai subie, et je m’en souviens. Alors, quiconque s’attaquerait à des gens qui ont fait que nous soyons libres, je m’élèverai contre lui. Que pensez-vous de l’autonomie de la Kabylie ? Alors là ! Cela ne fait pas du tout partie de ma façon de voir. La Kabylie est une parcelle de l’Algérie, comme le dit si bien cette expression devenue un cliché : « Il n’y a pas de Kabylie sans l’Algérie, comme il n’y a pas d’Algérie sans la Kabylie ». Me concernant, je considère que nos chouhadas ne se sont pas sacrifiés pour qu’aujourd’hui on s’isole. Ils se sont sacrifiés pour l’Algérie entière, pour libérer tout le territoire. Tout le territoire algérien nous appartient. Et le gouvernement provisoire du MAK ? N’étant pas d’accord avec le principe, je ne vois pas comment je serais d’accord avec tout ce que cela peut générer. On vous a beaucoup critiqué lors de la campagne présidentielle de 1999 où vous avez applaudi le discours de Bouteflika à la salle Saïd Tazrout de Tizi-Ouzou. Que répondez-vous aujourd’hui à tête reposée ? Depuis 1962, il y a eu en Algérie des militants contre la dictature, contre l’interdiction de la parole, d’attitude… et ce qui est curieux, c’est qu’aujourd’hui on a abouti, soi-disant, car je n’y crois pas trop à cause de tout cela à un semblant de démocratie et qu’est-ce qu’on me demande, ou plus exactement, qu’est-ce qu’on exige de moi ? On exige de moi d’être sous contrôle, on m’interdit d’être libre, et personne n’a fait état de cela. Tout le monde journalistique m’a tiré dessus, sans faire cette remarque qu’on voulait empêcher un citoyen d’agir à sa guise, sans faire de mal à quiconque et sans entraîner qui que ce soit avec lui. J’aurais compris si j’avais organisé une campagne pour dire aux gens : « Venez, on va applaudir Bouteflika ». Là, j’aurais compris, là j’aurais assumé en tant que partisan ou partisan d’une idée, mais moi, j’avais tout simplement agi en tant que citoyen et on a voulu m’empêcher d’avoir une attitude que j’avais envie d’avoir. Je répète que je ne devais ni ne dois d’explication à personne au nom de cette même démocratie qu’ils disent défendre. Malheureusement, nos journalistes de l’époque n’avaient pas assez de maturité pour penser à ça, et ceci est grave et ça fait peur, hélas. Vous avez refusé une tournée lors de la campagne présidentielle passée, qu’elle en était la raison ? Une tournée à connotation culturelle, c’est honorer la culture et honorer mon pays, mais une tournée à connotation politique ne fait partie ni de mes ambitions ni de ma façon de voir les choses. Parlez-nous de votre relation avec le regretté Matoub Lounès ? Je crois que j’avais brossé l’essentiel du tableau dans l’interview que j’avais accordée à la chaîne de télévision Berbère TV, disons que j’avais dit l’essentiel. Matoub était un ami, au contraire de ceux qui se prétendent maintenant amis et qui ne l’ont en fait jamais été. Il est vrai qu’on avait des différends du moment qu’il avait sa personnalité et que j’avais la mienne. Qu’il y ait eu des divergences entre nous, cela n’est vraiment pas exceptionnel. Le fait qu’on soit fâchés aussi ne l’est pas. Peut-être que s’il était encore de ce monde, aujourd’hui nous serions redevenus de bons amis. Ce sont des choses qui arrivent, et c’est la vie. Seulement, les gens prennent les choses à leur façon et malheureusement de la mauvaise. Ils construisent donc des tas d’histoires qui n’ont pas lieu d’être. Cette gêne, cette mésentente qui ressort en filigrane dès qu’on parle de vous deux est-elle justifiée ? Justifiée, certainement, en ce sens où deux amis ont des différends et se sont fâchés par la suite. Il y a toujours une raison à cela et c’est toujours justifié. Matoub et moi étant tous deux des personnages publics, les gens ont interprété les choses à leur guise et nous ont mélangés à toutes les sauces. C’est parfaitement injuste, mais c’est dans l’ordre des choses, et on n’y peut rien. Sous d’autres cieux, cela aurait pu être un prétexte à l’enrichissement même de la culture. Il est dommage que chez nous on y voit que le côté négatif des choses. Si par contre on nous avait confronté Matoub et moi d’une autre manière, c’est-à-dire d’une manière plus saine, je crois que cela aurait donné quelque chose d’enrichissant. Mais les auteurs de ce genre de supputations ne sont pas sains eux mêmes dans leur tête et donc ils donnent des connotations malsaines. Sinon, mon histoire avec Matoub n’était pas aussi dramatique que le laissaient supposer les gens. Peut-on dire qu’Aït Menguellet vit de son art ? Oui, oui, chanter m’a fait vivre. Il est vrai qu’avec ce phénomène du piratage de haute volée, l’industrie du disque connaît une crise, mais à côté de cela, il y a les galas, les droits d’auteur, et comme je ne mène pas une vie sur un grand pied… Je mène en fait une vie simple qui ne me demande pas de grands moyens. Donc, on peut dire qu’Aït Menguellet vit de son art... Oui, j’ai cette chance-là, je crois que beaucoup d’artistes ne pourront pas en dire autant malheureusement, car j’estime que c’est une chance. Maintenant, est-ce qu’elle durera ? Je n’en sais rien. J’en vis décemment, je n’ai pas l’habitude de faire des folies, donc cela me permet de vivre dans une aisance relative. Que pensez-vous du statut de l’artiste dans notre pays ? Le statut de l’artiste, c’est très délicat d’en parler. Je crois que les pouvoirs publics renvoient dos à dos les propositions de l’artiste avec ce que le ministère concerné pourrait faire. C’est-à-dire que l’Etat conditionne ce statut à l’organisation préalable des artistes, en associations, en syndicats… ; les artistes, quant à eux, placent le statut avant toute organisation ! Convenez que c’est un cercle vicieux. Sincèrement et sérieusement, un statut on en a besoin, car jusqu’à présent l’artiste pratique son art en dilettante, il n’est ni assuré ni n’a de reconnaissance légale réelle. Là, on parle spécialement de la chanson. Spécialement, car la chanson a participée à tous les mouvements qui ont fait avancer les choses dans notre pays, depuis l’ère sombre de la colonisation jusqu’à nos jours. L’artiste a toujours eu une place prépondérante et un mérite dans l’évolution positive du pays, alors cela ne serait que justice que de le respecter en mettant sur pied un statut qui puisse le valoriser et le reconnaître en tant que tel. Que pensez-vous de la situation actuelle de la chanson kabyle ? A mon sens, la chanson kabyle est toujours allée en dents de scie, un coup ça va, un coup ça ne va pas, ça descend et ça remonte, mais globalement, on peut dire qu’elle se porte bien en ce sens qu’il y a un foisonnement de chanteurs et de genres. D’ailleurs, cela a toujours été ainsi, la décantation se fera. Il y aura ceux qui seront abandonnés en chemin et ceux qui vont perdurer ; donc, le tri se fera de lui-même, car ceux qui écoutent savent apprécier et finissent par élire. Me concernant, j’aime bien le fait qu’il y ait foisonnement, qu’il y ait justement de la matière pour que le choix se fasse. Et il me semble qu’il y a aujourd’hui une pléiade de jeunes promis à un bel avenir dans le monde de la chanson kabyle. Par exemple ? Si Moh, Zimou, Ali Amran, Djamel Kaloun… pour ne citer que ceux-là. Mais il y a tant d’autres, et à mon sens, il n’y a pas lieu de s’inquiéter pour l’avenir de la chanson kabyle. Je citerai aussi Djafer, et ce n’est pas parce que c’est mon fils, mais c’est parce qu’il est bourré de talent. Qu’auriez-vous été si vous n’étiez pas chanteur ? Si je n’étais pas chanteur, je crois que j’aurais fini par embrasser finalement ma première vocation, celle d’ébéniste. J’ai toujours adoré travailler le bois. Quelle place occupe le sport dans votre vie ? Le sport occupe une place prépondérante dans ma vie, mais disons que j’ai toujours été contre la compétition, bien que je ne tire pas sur ceux qui aiment la compétition, car ce sont des gens qui veulent s’affirmer et c’est tout à fait légitime. De mon point de vue, le sport, je l’ai adopté beaucoup plus pour un équilibre physique et mental. Et à part le sport, que faites-vous de votre temps libre ? Oh, mon Dieu ! Il y a tellement de choses à faire ! D’abord, gérer sa famille ; je crois que les pères de famille ne me contrediront pas, pour gérer sa famille on a besoin de tout le temps qu’on a. Principalement, mon temps, je le consacre à mes enfants, à ma famille. Le reste ? D’aucuns pensent que le travail d’artiste dégage un temps libre… Peut-être oui, quand on est célibataire ! Mais là, en étant père, j’avoue qu’il ne m’en reste pas beaucoup. Entre la chanson, mes occupations familiales et mes loisirs, je mène une vie assez bien remplie. Je vois ici deux beaux arcs, des sabres, le fameux Yin et Yang et une série d’objets que je présume être des souvenirs de vos nombreux voyages. Parlez-nous un peu de ce petit musée autour de nous ? Un musée ? Non ! Ce sont en fait des choses que j’aime, et comme nous sommes là à faire l’interview dans mon studio, là où je passe beaucoup de temps, j’aime être entouré de ces objets. J’ai mes arcs et peu de gens savent que je suis archer depuis 1978. Je pratique le tire à l’arc, mais en tant qu’amateur ; d’ailleurs, je pratique tout en tant qu’amateur. Le sport pour moi doit faire partie de l’hygiène de vie, de la vie même, parce qu’il est d’une utilité incontestable, aussi bien pour rester en forme que pour rendre visite le moins possible au médecin. Le sport fait partie de ma vie et j’essaye de varier de façon à ce que cela fasse aussi partie de mes loisirs. Je n’aurais pas pu faire du sport si je n’y prenais pas plaisir avant tout, c’est important. Etes-vous intéressé par d’autres formes d’expression artistique ; si oui, lesquelles ? Intéressé en tant qu’amateur, oui. J’aime l’art en général. J’apprécie les belles peintures ; d’ailleurs, j’en possède une belle collection. La sculpture également, le théâtre aussi… Bref, j’apprécie tout ce qui est beau, tout ce qui est bien exécuté. Et quelle place faites-vous à la lecture ? La place qu’occupe la lecture est au moins aussi importante que celle qu’occupe le sport. Je ne peux pas vivre sans la lecture, cela veut tout dire. Vous me demanderez peut-être ce que j’aime lire. Je suis un lecteur plutôt éclectique, je m’intéresse à tout, je suis curieux de tout et je passe ma vie à chercher des réponses à tout. (Rires). Vous avez des préférences pour certains auteurs, certains livres J’avoue que j’ai un faible pour la science-fiction, le polar, mais j’ai lu et aimé tous les genres, je vous ai dit que j’étais éclectique. J’ai par exemple tout lu de Yasmina Khadra, que j’ai eu le grand plaisir de le rencontrer. Quel est votre livre de chevet ? En ce moment, c’est le livre de Mammeri Yennayas El Cheikh Mohand, j’adore aussi bien le personnage de Cheikh Mohand que celui de Mammeri qui a été à la hauteur pour appréhender ce personnage. Mais bon, je dois avouer que mes livres de chevet changent périodiquement (rires) : Nietzsche, Machiavel, Jostein Gaarder qui m’a fait revisiter mes cours de philosophie… Le dernier roman que vous avez lu... C’est en cours, je me suis attaqué au roman de Stieg Larsson, un Suédois. Il a écrit trois tomes volumineux qu’il a intitulés Millenium. En fait, dans le roman, Millenium est une revue. Je trouve l’histoire géniale, car c’est un bon thriller en même temps, très agréable à lire, avec beaucoup de suspense et d’action. Il est très instructif aussi. Malheureusement, l’auteur, qui était également journaliste, est mort d’une crise cardiaque au moment où il remettait ses trois volumes à l’éditeur, ce qui est bien triste. En restant toujours dans le registre suédois, j’apprécie beaucoup un écrivain de romans policiers, Hening Mankell. J’adore sa façon d’écrire car, comme je viens de le dire, je me suis beaucoup frotté au monde du roman policier, je trouve que c’est le summum dans le genre. Etes-vous tenté par l’écriture ? Euh, pas vraiment… D’ailleurs, je ne sais pas si j’en suis capable. Peut-être ? Si un jour l’envie d’écrire me prend, je serai dans l’obligation de m’associer avec quelqu’un qui a une belle plume pour que je puisse exprimer mes idées. Qu’en est-il de Passerelles ? Eh bien, Passerelles est une revue que nous avons créée dans un but purement culturel. C’est une revue qui nous a apporté beaucoup de satisfaction, qui nous a demandé également énormément d’efforts, mais qui a tout fait, sauf nous enrichir, quoi qu’en pensent certaines gens. Il y avait des moments où nous puisions de nos poches, aussi bien mon associé que moi, mais c’était un plaisir de dépenser pour voir une aussi belle revue paraître. Malheureusement, cette revue, tant que nous disposions de l’argent de la publicité pour couvrir les frais de sa publication, nous la publiions chaque mois ; donc, c’est une revue mensuelle, mais à présent la publicité faisant défaut, nous nous retrouvons obligés de ne la faire paraître qu’occasionnellement, cela veut dire que ce que nous faisons maintenant, c’est ramasser des miettes, petit à petit, jusqu’à ce que nous arrivions à rassembler la somme qu’il faut pour pouvoir l’éditer. Votre film préféré. .. Franchement, je n’ai pas de film préféré, je ne pense pas être un grand cinéphile, même si je sais apprécier un bon film. Et en tamazight ? J’aime beaucoup le film de Belkacem Hedjadj, Machaho, je le trouve bien fait à tous égards Puis-je revenir à votre vie « un peu plus privée » ? Vous n’y êtes pas déjà ? Allez-y ! Djaffar, enfant, a eu un accident, pouvez-vous nous en dire plus ? Oui, c’est vrai, mon fils Djaffar a eu un accident qui a failli lui être fatal. Il a été électrocuté à 30 000 volts ! Ceci pour dire qu’il a eu de la chance ! C’était une période que j’ai très très mal vécue et que j’ai affrontée avec la force du désespoir parce qu’il fallait le sauver. D’ordinaire, je suis quelqu’un de plutôt calme et lent, mais dès qu’il s’agit de ma famille, je deviens plus efficace. J’ai heureusement tout fait pour faire face à cette situation et Dieu merci, il a été sauvé. Je n’aurais jamais cru goûter à ce plaisir de tenir sur mes genoux ce fils Djaffar et le voir grandir aujourd’hui. C’est pour moi un immense bonheur. Beaucoup de choses ont été dites sur la condamnation de votre fils Ribouh en France, pourriez-vous nous livrer la vraie version des faits ? Pour répondre à cette question, il y a trois versions : la version longue, la version courte et la version très courte. Je vais vous raconter la version très courte. Mon fils a été victime d’une machination et je lui en ai voulu parce qu’il n’a pas su m’écouter et voir le piège qui lui a été tendu. Je l’ai averti qu’il allait lui arriver quelque chose de fâcheux, qu’il avait affaire à des gens qui allaient se servir de lui, qu’il serait le bouc émissaire parfait, qu’il serait condamné sans que personne ne puisse lui venir en aide et que moi-même je serais dans l’impossibilité de faire quoi que ce soit. Je l’ai aidé à se déconnecter de cette situation mais lui, en voulant faire le Don quichotte, parce que mon fils aime jouer les justiciers, il l’a appris à ses dépens qu’on ne peut pas tout le temps jouer aux justiciers impunément. Et c’est pour ça qu’il est tombé dans le piège contre lequel je l’avais averti. Un piège bien préparé, et les gens qui l’ont préparé ont eu tout le temps de le faire. Est-ce que par ce piège on voulait toucher à votre personne ? Non ! Effectivement, beaucoup de gens ont pensé que c’est un complot qui me visait moi ; en fait, c’est faux ! C’est une situation qui s’est créée indépendamment de moi, mais dont je connaissais l’origine, dont je voyais les ficelles. Simplement, mon fils a été aveuglé par sa bonté, il a été victime par son esprit de sacrifice. Où en est l’affaire à présent ? Ribouh est quelqu’un qui se comporte très bien. Il est très bien considéré, donc il bénéficie de grâces régulièrement, j’espère qu’il sortira bientôt. Il a été dit que l’Etat français vous a proposé la légion d’honneur, pourquoi l’avoir refusée ? La seule légion d’honneur que j’accepterai sera celle de mon pays, si un jour elle existe. Vous avez également refusé l’invitation de Zidane lors de sa visite à Béjaïa, pourquoi ? Vous savez, on m’a invité à plusieurs événement soi-disant grandioses ; je n’aime pas trop me montrer, je n’aime pas me servir de la popularité des autres pour briller. Sans être prétentieux, je brille déjà assez comme ça. Cette lumière me suffit largement. C’est la lumière des humbles qui m’intéresse. Donc, briller aux côtés d’un Zidane que j’admire, que j’adore - Zidane m’a fait aimer le football - donc briller à côté de lui ne m’intéresse pas, tout simplement parce que c’est bien à lui de briller étant donné que moi j’avais ma place ailleurs. Revenons à votre actualité ; votre album est-il fin prêt ? Pratiquement. Jeff s’occupe des dernières retouches Etes-vous satisfait du travail ? Oui, je suis satisfait car c’est un travail réalisé en famille, j’ai écrit mes chansons comme d’habitude et Djaafar les a embellies avec des arrangements que seul lui peut réussir pour la simple raison qu’il ne peut y avoir dans le monde un arrangeur qui me comprendrait mieux que lui ; ajoutons à cela qu’il est talentueux, donc je lui fais entièrement confiance. Je vous apprends encore autre chose, la conception de la maquette a été faite par mes deux enfants Tarik et Hayat qui se sont attaqués à la conception de la jaquette à partir des photos qui ont été prises par ma fille Hayat qui est une ancienne artiste de l’école des beaux-arts et qui se révèle être aussi excellente photographe. La traduction de mes textes en français a été assurée par mon fils Tarik, et comme il est aussi infographe, il a aidé sa sœur dans la conception de la jaquette. L’enregistrement, je le fais conjointement avec mon fils Djaffar. Donc, comme vous le voyez, c’est un travail en famille et j’en suis très fier. Vous avez évoqué dans la presse « des bonus » en annexe… Oui, cette fois-ci, à côté de mes nouvelles créations, six chansons, j’ai traduit en kabyle la chanson mythique de Bob Dylan Blowing in the wind. En fait, depuis que je l’avais interprétée en duo avec Hugues Aufrey, c’était à Bercy en 2003, l’idée de l’enregistrer n’a pas quitté mon esprit. Maintenant que l’occasion s’est présentée, c’est chose faite. Vous avez parlé aussi d’une reprise du chanteur Akli Yahiatene... Oui, en effet, j’allais adjoindre à mes chanson un duo que j’ai interprété avec Akli Yahyaten sur sa célèbre chanson Ya l’menfi, lors du gala qui nous a associés il y a quelques jours au Palais des sports à Paris. Malheureusement, lui n’étant pas disponible en Algérie pour placer sa voix en studio, j’ai dû surseoir, et la chanson ne sera pas présente dans l’album. Donc, l’album ne comptera que sept chansons... Exact. Est-il prévu des tournées pour la promotion de votre album ? Des tournées, s’il y en a, ça ne sera certainement pas pour la promotion de l’album. Vous m’avez demandé tout à l’heure si je vivais de mon art, donc c’est tout simplement une affaire de travail pour moi, parce qu’il faut vivre, il faut travailler. J’ai un travail bien agréable, les tournées me permettent de retrouver les gens que j’aime et ce n’est pas de la démagogie, car si je ne les aimais pas, j’aurais certainement fait autre chose. Donc, faire une tournée c’est pour moi le plaisir de retrouver les gens, un plaisir qui m’assure également mon quotidien, alors je me consacre à ce plaisir de chanter, d’être écouté, d’être acclamé, de vivre des moments de parfaite symbiose avec mon public. Par Nadjet Bendaoud El Watan du 19/07/2010 | |
| | | invité Invité
| Sujet: Re: Lounis Aït menguellet: Mon histoire avec Matoub Lounès n’était pas aussi dramatique... Mar 20 Juil - 16:00 | |
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Quand, à l'appel du président Bouteflika, l'heure de la Concorde civile avait sonné en Algérie, pour Lounis Aït Menguellet, elle failli être celle de la discorde. De la rupture avec une partie du public mis en condition de brûler l'idole qu’il a adorée depuis plus de 30 ans. C'est un des moments les plus durs dans la carrière du poète. Invité comme personnalité à assister à un meeting du président de la République à Tizi Ouzou, le chanteur au verbe incandescent, mais à l'esprit apaisé, avait applaudi le chef de l'État. Comme presque toute la salle où les invités avaient été — certes — triés sur le volet. C'était une période où Abdelaziz Bouteflika, en père fouettard, avait tenu des propos très peu diplomatiques. Voire méprisants. Il avait parlé de “nains” pour les habitants d'une région qui a constitué l'avant-garde du mouvement nationaliste et des luttes démocratiques. Les caméras de l'ENTV avaient capté ce moment où Lounis applaudissait sans dissimuler un certain malaise. Intuition, car ce moment lui vaudra un déchaînement de critiques inouï. La discorde à l'heure de la concorde. Lounis imprimera cette douleur dans une chanson au titre peu énigmatique de “Dhiriyi” (Je suis mauvais). Incrédule face à ce cauchemar, Lounis assume et réplique de manière cinglante à “ceux qui jouissent du mal qu'ils sèment”. “Si je suis du côté des justes, si ma parole est vérité, si je veux que le soleil brille, alors que je suis mauvais”, conclut-il. Dix ans après cette épreuve, Aït Menguellet garde la même analyse. “Pour certains, je suis toujours mauvais et pour d'autres, je ne l'ai jamais été”, a répondu Lounis, interrogé lors d'une conférence de presse à Paris à quelques jours de son concert avec Akli Yahiatène au palais des Congrès. Ces nouvelles retrouvailles avec le public interviennent alors que le chanteur se prépare à éditer un nouvel album composé de six chansons. L'une est un hommage à Lounis lui-même composé par Si Mouh et Djafar, le fils qui a réussi à convaincre définitivement son père de la nécessité d'un travail musical. Plutôt poète, Lounis a toujours veillé à ne pas distraire son public et à ne pas noyer son message dans les arrangements musicaux. Désormais, il sait qu'il peut concilier les deux. Mais il ne faut surtout pas attendre de lui un discours politique. Il n'a aucune vocation à cela. Et si l'Algérie souffre, il préfère l'observer à partir de son lit de doux rêveur. Car ses rêves ne sont qu'optimisme. Et l'Algérie, Lounis l'a dans le cœur. En jeteur de passerelles, il a un seul regret : que le public arabophone ne comprenne le kabyle “qui est aussi sa langue et une partie de sa culture”. Sur la scène du palais des Congrès, Lounis va donc joindre sa voix à celle d'Akil Yahiatène. L'auteur du légendaire El-Manfi, hommage aux émigrés algériens traqués par la police française pendant la guerre d'indépendance, s'était produit sur la même scène en 1963. Avec Nora, Khelifi Ahmed, Rabah Driassa et Dahmane El-Harrachi. À près de 80 ans, Akli a la vigueur d'un jeune homme fringant. S'il souffre aujourd'hui, c'est de ne pouvoir créer par crainte du piratage. Présent à la conférence de presse, le patron de BRTV Mustapha Sadi a salué les deux artistes en lesquels il a vu des “points de repère” dans la quête identitaire algérienne. Pour le producteur du spectacle, le concert est un “moment exceptionnel”
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